[Le 26 janvier 2018] l’Assemblée a (…) adopté sans vote une décision par laquelle elle change le nom du 7 avril qui, de la « Journée internationale de réflexion sur le génocide au Rwanda », devient « Journée internationale de réflexion sur le génocide des Tutsis au Rwanda en 1994 ». Cette décision, présentée par le Rwanda, rappelle que, durant le génocide, des Hutus et d’autres personnes s’étant opposés au génocide ont également été tués.
La représentante rwandaise a expliqué qu’il s’agit de corriger « les erreurs » du titre et du premier paragraphe du dispositif de la résolution 58/234 du 23 février 2004 « sans toutefois en modifier les autres parties ». Il s’agit, a-t-elle précisé, de capturer sans ambiguïté les faits historiques de ce qui s’est passé en 1994 et qui est bien un « génocide contre les Tutsis au Rwanda ». L’exactitude historique et la précision des mots sont « essentielles» lorsqu’on parle du génocide, a martelé la représentante. Les tactiques du déni et du révisionnisme sont bien connues: ceux qui ont été impliqués par leur action ou leur omission aiment avancer la théorie du double génocide dans l’espoir futile de se soustraire à leur responsabilité. Au Rwanda, a poursuivi la représentante, la réflexion et la commémoration du génocide de 1994 est une partie importante de la réconciliation et de l’unité nationale.
Les plus d’un million d’hommes, de femmes et d’enfants, qui sont morts, n’étaient ni victimes de catastrophes naturelles ni combattants. C’étaient des gens ordinaires qui ont été tués, dans des conditions atroces, parce qu’ils appartenaient à un groupe déshumanisé et ciblé pour son extermination totale. Toute personne appartenant à une autre communauté et s’opposant à ce plan d’extermination a été sommairement exécutée. Tous les ans au Rwanda et à chaque commémoration, nous honorons le courage et l’humanité de tous les Rwandais qui ont payé le prix le plus fort parce qu’ils s’opposaient au génocide des Tutsis.
La décision d’aujourd’hui, a insisté la représentante, s’aligne avec le libellé du Tribunal pénal international pour le Rwanda (TPIR) qui a conclu, le 6 juin 2006, à « un fait de notoriété publique qu’entre le 6 avril et le 17 juillet 1994, un génocide a été perpétré au Rwanda contre le groupe ethnique tutsi ». Il est particulièrement regrettable, a-t-elle conclu, que malgré les nombreuses résolutions de cette Assemblée condamnant le déni du génocide, l’on continue à voir ce déni et le révisionnisme se répandre dans le monde. Le représentant du Groupe africain a fait le même constat, avant de rappeler que plus de 20 ans après le génocide, certains de ses auteurs sont toujours en liberté en Europe et en Amérique du Nord, « en première ligne de la propagande négationniste ».
La représentante des États-Unis a émis des réserves quant à l’idée d’amender une résolution antérieure alors que son homologue de l’Union européenne « regrettait profondément » que le consensus n’ait pas été possible sur le fait que la Journée devrait aussi inviter à réfléchir sur le sort des autres victimes, les non-Tutsis qui s’étaient opposés au génocide. Ce génocide sera toujours «une tâche sur la conscience internationale », a tranché la représentante d’Israël.
*A/72/L.31
**A/72/700
ADOPTION DE LA DÉCISION SUR LA JOURNÉE INTERNATIONALE DE RÉFLEXION SUR LE GÉNOCIDE DES TUTSIS AU RWANDA EN 1994 (A/72/L.31)
La représentante des États-Unis a insisté sur l’importance qu’il y a à commémorer la mémoire des plus de 800 000 personnes qui ont perdu la vie pendant des violences innommables au Rwanda en 1994. En se ralliant au consensus sur ce texte, les États-Unis, a confié la représentante, voient l’occasion de nous rappeler notre humanité commune pour pouvoir prévenir ce type d’atrocités de masse et défendre les droits et la dignité de chaque être humain. Toutefois, la représentante a estimé que la seule modification du titre et de certains termes du dispositif de la résolution de 2003 ne permettait pas de couvrir toute l’ampleur des atrocités. Elle n’a pas caché ses réserves quant à l’idée de revenir [sur] des textes précédents, sans pour autant s’opposer au texte adopté aujourd’hui.
Au nom du Groupe des États d’Afrique, le représentant de la Guinée équatoriale s’est félicité de la décision qui est « le moins que l’on puisse faire » pour honorer la mémoire des enfants, des femmes et des hommes qui ont été brutalement assassinés, il y a 24 ans, et pour se souvenir de toutes les victimes de ce chapitre sombre et tragique de notre histoire. En ce moment de réflexion et de souvenir, a-t-il poursuivi, nous nous tenons aux côtés du peuple rwandais et nous saluons les progrès qu’il a faits pour se remettre de cet évènement innommable et tracer la voie d’un brillant avenir.
Citant le « grand panafricaniste », Nelson Mandela, le représentant a dit: « un peuple courageux n’a pas peur de pardonner pour l’intérêt de la paix ». Le peuple courageux du Rwanda, a commenté le représentant, a fait le choix de s’unir et d’impliquer tout le monde dans le processus de justice et de réconciliation. Il a fait le choix de construire un pays qui appartient à tous et de renforcer le tissu social pour prévenir tout autre crime de masse. Nous ne tiendrons notre promesse d’éviter à d’autres pays de connaître les peines et les souffrances que les Rwandais ont endurées que si nous tirons les leçons de l’expérience du Rwanda, a prévenu le représentant, en rappelant que l’Union africaine a consacré ces leçons dans les valeurs panafricaines de solidarité et d’unité et de son principe essentiel de non-indifférence consacré dans son Acte constitutif.
Pourtant plus de 20 ans après le génocide des Tutsis, nous voyons encore négationnisme, révisionnisme et déni, « huitième et étape finale d’un génocide » selon Gregory Stanton, un ancien du Département d’État américain. Il est donc impératif de rejeter d’une même voix le négationnisme par des lois. Plus de 20 ans après le génocide, certains de ses auteurs sont toujours en liberté en Europe et Amérique du Nord, en première ligne de la propagande négationniste. Ils doivent être traduits en justice, a martelé le représentant, avant d’appuyer l’appel du Président de l’Assemblée à démontrer l’engagement en faveur de la Trêve olympique et à prendre des actions concrètes pour promouvoir et renforcer la culture de paix et d’harmonie.
(…)
Le représentant de l’Union européenne a jugé essentiel de se souvenir et de réfléchir, au niveau international, à des tragédies comme le génocide qui a frappé le Rwanda il y a 23 ans. L’Union européenne se félicite donc de la décision adoptée ce jour mais elle regrette profondément que le consensus n’ait pas été possible sur le fait que la Journée devrait aussi inviter à réfléchir sur le sort des autres victimes, les non-Tutsis qui s’étaient opposés au génocide. L’Union européenne estime qu’une réunion aussi importante aurait requis davantage de temps et qu’il aurait été adéquat de débuter les discussions bien avant le 20 novembre 2017.
La représentante d’Israël s’est associée au consensus et a souligné que la réflexion est une responsabilité collective de la communauté internationale. Les meurtres systématiques qui ont eu lieu au Rwanda seront toujours une tâche sur la conscience internationale, a-t-elle estimé.
Source: https://www.un.org/press/fr/2018/ag12000.doc.htm
Présentation de 2 résolutions de l’ONU datées respectivement du 23 février 2004 et du 26 janvier 2018.
1. Nations Unies A/72/L.31 Assemblée générale Distr. limitée 12 décembre 2017 Français Original : anglais
17-22385 (F) 141217 141217 *1722385* Soixante-douzième session
Point 66 b) de l’ordre du jour
Nouveau Partenariat pour le développement de l’Afrique : progrès accomplis dans la mise en œuvre et appui international : les causes des conflits et la promotion d’une paix et d’un développement durables en Afrique
Rwanda : projet de décision
Journée internationale de réflexion sur le génocide des Tutsis au Rwanda en 1994
L’Assemblée générale,
Rappelant sa résolution 58/234 du 23 décembre 2003, et ayant à l’esprit que depuis 2004, l’Organisation des Nations Unies célèbre le 7 avril la Journée internationale de réflexion sur le génocide au Rwanda,
Rappelant également la résolution 955 (1994) du Conseil de sécurité en date du 8 novembre 1994 sur la création du Tribunal criminel international chargé de juger les personnes présumées responsables d’actes de génocide ou d’autres violations graves du droit international humanitaire commis sur le territoire du Rwanda et les citoyens rwandais présumés responsables de tels actes ou violations commis sur le territoire d’États voisins entre le 1er janvier et le 31 décembre 1994,
Rappelant en outre que la Chambre d’appel du Tribunal pénal international pour le Rwanda a, le 16 juin 2006, dressé le constat judiciaire1 concluant qu’il était « un fait de notoriété publique » qu’« entre le 6 avril et le 17 juillet 1994, un génocide a été perpétré au Rwanda contre le groupe ethnique tutsi », rappelant que plus d’un million de personnes ont été tuées dans ce génocide, y compris des Hutus et d’autres personnes s’étant opposées au génocide, et prenant note avec préoccupation toute forme de négation de ce génocide,
1 ICTR-98-44-AR73(C).
Rappelant la résolution 2150 (2014) du Conseil de sécurité du 16 avril 2014,
Reconnaissant l’importance de la lutte contre l’impunité pour toutes les violations qui constituent le crime de génocide,
-
Décide de proclamer le 7 avril Journée internationale de réflexion sur le génocide des Tutsis au Rwanda en 1994 ;
-
Rappelle que, durant le génocide des Tutsis en 1994, des Hutus et d’autres personnes s’étant opposées au génocide ont également été tués.
__________________ A/72/L.31
17-22385 2/2
Source: https://documents-dds-ny.un.org/doc/UNDOC/LTD/N17/439/57/PDF/N1743957.pdf?OpenElement
2. Nations Unies A/RES/58/234 Assemblée générale Distr. générale
23 février 2004 Cinquante-huitième session
Point 39, b, de l’ordre du jour
03 50857
Résolution adoptée par l’Assemblée générale [sans renvoi à une grande commission (A/58/L.55 et Add.1)]
58/234. Journée internationale de réflexion sur le génocide de 1994 au Rwanda
A/RES/58/234
L’Assemblée générale,
Guidée par la Charte des Nations Unies et la Déclaration universelle des droits de l’homme1,
Rappelant sa résolution 260A (III) du 9 décembre 1948 par laquelle elle a adopté la Convention pour la prévention et la répression du crime de génocide ainsi que sa résolution 53/43 du 2 décembre 1998, intitulée «Cinquantième anniversaire de la Convention pour la prévention et la répression du crime de génocide », et ses autres résolutions pertinentes relatives à la question du génocide,
Rappelant également les conclusions et les recommandations de l’enquête indépendante demandée par le Secrétaire général, avec l’approbation du Conseil de
sécurité2, sur les actions de l’Organisation des Nations Unies lors du génocide de 1994 au Rwanda3,
Rappelant en outre la résolution 955 (1994) du Conseil de sécurité, en date du 8 novembre 1994, sur la création du Tribunal pénal international chargé de juger les personnes présumées responsables d’actes de génocide ou d’autres violations graves du droit international humanitaire commis sur le territoire du Rwanda et les citoyens rwandais présumés responsables de tels actes ou violations commis sur le territoire d’États voisins entre le 1er janvier et le 31 décembre 1994,
Rappelant le rapport contenant les conclusions et les recommandations du Groupe international d’éminentes personnalités chargé par l’ex-Organisation de l’unité africaine d’enquêter sur le génocide au Rwanda et les événements connexes, intitulé « Rwanda – le génocide évitable »,
Constatant avec préoccupation que nombre des auteurs présumés d’actes de génocide n’ont toujours pas été traduits en justice,
Consciente qu’il importe de combattre l’impunité pour toutes les violations qui constituent le crime de génocide,
Convaincue que le fait de dénoncer les auteurs, y compris leurs complices, de faire en sorte qu’ils aient à répondre de leurs actes et de rétablir la dignité des victimes en reconnaissant et en commémorant leurs souffrances permettrait aux sociétés de prévenir des violations futures,
Prenant note de la recommandation formulée par le Conseil exécutif de l’Union africaine à sa deuxième session ordinaire, tenue à N’Djamena du 3 au 6 mars 2003, tendant à ce que l’Organisation des Nations Unies et la communauté internationale proclament, en souvenir du génocide de 1994 au Rwanda, une journée internationale de réflexion et d’engagement renouvelé à lutter contre le génocide partout dans le monde4,
Notant qu’avril 2004 marque le dixième anniversaire du génocide au Rwanda,
1. Décide de proclamer le 7 avril 2004 Journée internationale de réflexion sur le génocide au Rwanda ;
2. Encourage les États Membres, les organismes des Nations Unies et les autres organisations internationales compétentes ainsi que les organisations de la société civile à observer la Journée internationale, notamment en organisant des cérémonies spéciales et des activités à la mémoire des victimes du génocide au Rwanda ;
3. Encourage également les États Membres, les organismes des Nations Unies et les autres organisations internationales compétentes à envisager de promouvoir la mise en œuvre des recommandations figurant dans le rapport de l’enquête indépendante sur les actions des Nations Unies lors du génocide de 1994 au Rwanda3 ;
4. Engage tous les États à agir conformément à la Convention pour la prévention et la répression du crime de génocide afin d’assurer que des événements semblables à ceux qui ont eu lieu au Rwanda en 1994 ne se reproduisent plus.
78e séance plénière
23 décembre 2003
_______________
1 Résolution 217 A (III).
2 Voir S/1999/340.
3 Voir S/1999/1257, annexe.
Source: https://undocs.org/fr/A/RES/58/234